Le macramé est une technique traditionnelle de passementerie confectionnée au moyen de fil, de laine, de ficelle, de corde, … La matière est tressée grâce à des nœuds successifs, plats ou en volume, élémentaires ou complexes : nœud simple, nœud plat, en spirale, infini, chevron, diagonal, …
A partir de ces nœuds savamment confectionnés, les doigts de l’artisan donnent naissance à toute sorte de réalisations, de la plus minutieuse à la plus gigantesque, destinées au monde de la décoration, du bijou, sans oublier l’univers de l’art et du luxe.
Le macramé, une origine obscure
Si l’art du macramé accompagne l’humanité depuis des siècles, ses origines restent indéterminées. Il existe peu d’informations sur la provenance de cette pratique, même si des articles ménagers et des bijoux utilisant cette technique ont été retrouvés en Égypte lors de fouilles archéologiques.
Les traces les plus anciennes du travail de nouage, retrouvées en Mésopotamie par les archéologues sont datées de 15000 à 17000 ans avant notre ère. Il semblerait en effet que les Assyriens ou les Perses utilisaient cette technique consistant à nouer ensemble les fils à l’issue du travail de tissage d’une pièce.
D’autres découvertes ont mis au jour en Chine des preuves de l’existence de cet art du nouage décoratif. Ainsi ont été retrouvées des pièces de textiles de cérémonie ainsi que des tentures murales remontant au troisième siècle.
De Migramah à macramé
Cependant, ce sont les tisserands arabes qui vont transformer ce savoir- faire en un art où la combinaison des nœuds entre eux conduit à la création d’un véritable motif ornemental.
D’ailleurs, certaines sources soulignent que le mot macramé correspondrait à un dérivé de l’arabe migramah qui signifie « frange ornementale ». Mais d’autres pensent qu’il tire son origine du mot turc makrama, qui désigne une “serviette” ou un “mouchoir.
Le macramé, les marins et la conquête de l’Europe
Le macramé arrive en Espagne lors de la conquête mauresque au VIIIème siècle, pour atteindre l’Italie, en particulier la région de Ligurie (Capitale : Gênes).
Autour du XVIème siècle, cet art se répand dans l’ensemble de l’Europe par le biais des marchands itinérants mais surtout des marins, qui vont disséminer au fil de leurs périples l’art du macramé dans des contrées comme la Chine ou le Nouveau- Monde.
Pour ces marins en effet, l’art de nouer des cordages leur permet d’éviter l’ennui lors des longs voyages. Au cours des escales, ils se transforment en marchands, vendant ou troquant dans les ports les articles fabriqués comme des hamacs, des chapeaux ou des ceintures.
Cette tradition perdurera jusqu’au XXème siècle, lorsque l’arrivée de la radio supplantera le macramé comme passe-temps pour les marins.
Le macramé à la conquête de l’Angleterre
Au cours des siècles, l’art du nouage poursuit sa route pour aborder en Angleterre à la fin du XVIIème siècle. Introduit à la cour de Marie II (1662-1694) celle- ci enseigne la technique du macramé à ses dames d’honneur.
Mais c’est près de deux cents ans plus tard, à l’époque Victorienne, que cet art atteint son apogée en Angleterre : passe- temps apprécié par les femmes de l’époque, il fait fureur et envahit les maisons victoriennes : il orne le linge de table, les rideaux, en passant par les couvre-lits, les ombrelles ou les vêtements.
Le livre « La Dentelle Macramé » (1882) de Sylvia, très documenté et explicite, apprend aux lectrices comment ” travailler de riches garnitures pour les costumes noirs et colorés, aussi bien pour les vêtements de maison, […], que pour les ornements en forme de fées-boules, …”.
Petit à petit cependant, l’engouement pour le macramé s’estompe, pour revenir en force dans les années 1970.
Le macramé, icône des années 70
Les turbulences de cette période, accompagnées d’un certain rejet de la société de consommation et de ses valeurs, va ouvrir sur un mouvement mondial encourageant les individus à créer des communautés ou de micro- sociétés sur un mode plus traditionnel, prônant un retour à la «nature» et à une consommation raisonnée, voire minimale.
Cette mouvance s’accompagne naturellement d’un regain d’intérêt pour les pratiques artisanales, en contact direct avec la matière.
Le macramé s’inscrit parfaitement dans ce mouvement de valorisation du travail manuel, au même titre que le tricot, le crochet ou le tissage, et trouve une place de choix, tant dans la décoration intérieure que dans les accessoires de mode.
Puis l’engouement pour le macramé s’estompe à nouveau au début des années 1980.
Et aujourd’hui ?
De nos jours, le fait main est remis en valeur, et avec lui le macramé, que l’on retrouve sous forme de décorations murales, de suspensions pour plantes, mais également dans la création d’objets beaucoup plus petits et fins comme des bijoux.
En France, les artisans d’art qui utilisent le macramé pour créer des bijoux sont allés apprendre cette technique en Amérique du sud. Ainsi en est-il de Damien Dionisio qui, de retour de Bolivie en 2007 et après plusieurs voyages en Amérique Latine a importé et développé en Ardèche un savoir-faire précis de l’art des nœuds, qu’il utilise pour enchâsser des graines ou des pierres semi-précieuses entre des fils en nylon ciré.
Mais si le macramé se fait minimaliste, il permet également la création d’œuvres monumentales comme les surprenantes sculptures textiles imaginées par Sandra de Groot, qui s’inspire pour son travail de monuments d’architecture sacrée issues de différentes cultures.
Le macramé, source d’inspiration pour la haute couture et le milieu du luxe
Enfin, l’art du macramé, reconnu grâce au travail exceptionnel de certains artisans d’art, se voit ouvrir les portes du monde de la Haute couture et du luxe, tant dans l’hexagone qu’à l’international.
Ainsi la maison KOZIEL, qui imagine et développe des papiers peints et des tapisseries murales hors du commun a-t-elle décidé de mettre en lumière cet artisanat d’exception au travers des créations de Laurentine Perilhou, designer textile passionnée.
Cette magicienne des nœuds entrelace avec art et audace des matières aussi inattendues que des fibres animales, végétales ou synthétiques, qu’elle travaille brutes ou qu’elle ornemente de pierres fines, de perles ou de cristaux.
Son travail l’a conduite également à collaborer avec les plus grandes Maisons de Haute couture comme Jean Paul Gaultier ou Guerlain.
Ainsi, le macramé, revisité par des artisans d’art au talent unique qui continuent inlassablement à explorer cet univers de nœuds et de matières, s’est hissé d’une technique artisanale et utilitaire à un art de haut vol qui trouve aujourd’hui sa place dans les univers éblouissants de la décoration d’intérieur de luxe et de la haute couture.
Merci à Damien Dionisio et à Laurentine Perilhou pour leur accueil et pour nous avoir autorisé à utiliser leurs photographies.
Pour retrouver leur merveilleux travail :
https://trajetsdart.com/artisan/benedam-creation/
http://benedamcreation.over-blog.com/
http://laurentineperilhou.com/
Retrouvez également le travail monumental de Sandra De Groot: