La broderie remonte à la nuit des temps. Particulièrement riche et variée, elle puise ses racines dans l’histoire de l’humanité, les coutumes et les traditions ancestrales. C’est certainement la raison pour laquelle on retrouve des points identiques à travers le monde. Les noms changent, les motifs et les ornements reflètent la richesse des cultures, le langage des points est réinterprété et réinventé depuis des millénaires, mais encore aujourd’hui les brodeurs contemporains s’inspirent de ces traditions pour créer des œuvres en harmonie avec notre époque.
Il en est ainsi pour le point de croix : base de la broderie traditionnelle, formé de deux branches obliques de même longueur se coupant en leur milieu, il est l’un des points les plus utilisés au monde. Suivant les pays, il sera posé sur une étoffe tissée en armure toile, utilisé dans la technique dite « du point compté « ou pratiqué à partir d’un motif tracé en amont sur un support de type canevas.

Le point de croix présente des variantes comme le demi-point de croix, le point droit, le point d’étoile ou le point de croix allongé et se décline en plusieurs dérivés : point de Smyrne, de Rhodes ou de diable, point de chausson, d’épine ou de zigzag. Il est brodé seul, en bordure ou en remplissage. Le point d’Assise quant à lui consiste à créer des motifs en négatif : les dessins apparaissent dans l’espace non brodé alors que le fond est rempli de points de croix.
Le point de croix, une histoire millénaire
Le point de croix trouve ses racines dans l’Antiquité et les traces les plus anciennes ont été retrouvées dans des tombes chinoises datant de la dynastie des Han (-206 av. J.C. /220 ap. J.-C.). La broderie Huangmei au point de croix serait née sous les dynasties Tang (618-907) et Song (960-1279) pour atteindre sa maturité à la fin de la dynastie Ming (1368-1644) ou au début de la dynastie Qing (1644-1911).
Les motifs proposent des effets décoratifs qui s’adossent à une culture régionale forte. Les broderies sont réalisées sur une toile tissée localement, connue sous le nom de « grand tissu ». Teint en bleu cyan, celui-ci sert d’arrière-plan à des motifs variés brodés au point de croix à l’aide de fils multicolores, dans une harmonie de couleurs et de nuances parfaites. La technique, qui consiste à piquer à travers chaque point d’intersection entre la chaîne et la trame donne au motif une impression de relief particulièrement réussi.
Les principaux motifs de la broderie Huayao sont pour leur part exécutés avec des fils fins appliqués sur une toile grossière d’un bleu profond. Ce savoir-faire est unique en termes de compétences. En effet, sans avoir besoin d’esquisses ou de modèles, la réalisation dépend entièrement des mains adroites des jeunes filles qui brodent sans l’aide de grilles, se basant uniquement sur des motifs issus de leur imagination et sur leur interprétation propre de la beauté.

Le point de croix en Europe
Si quelques rares fragments de broderie au point de croix, datant de 850 après J.C. et provenant d’Asie centrale ont pu être retrouvés par les archéologues, c’est bien au Moyen Âge que commence en Europe la véritable histoire de ce point.
Entre le Xème et le XIIIème siècle, tapis et broderies arrivent d’Orient par l’intermédiaire des croisés et des Maures. L’Occident, également influencé par l’Art byzantin s’approprie progressivement des décors et des motifs jusque-là inconnus, pour les transposer en utilisant le point de croix, technique la plus simple et la plus rapide à exécuter. Apanage de la noblesse, la broderie est alors pratiquée par les châtelaines, que notre vision du Moyen âge nous fait imaginer brodant près d’une fenêtre pour faire passer le temps. Elles travaillent à embellir les vêtements masculins ou féminins mais aussi à confectionner des broderies à caractère sacré.

La Renaissance et la popularisation du point de croix
Mais c’est à la Renaissance que le modeste point de croix se répand dans l’Europe entière et se démocratise jusqu’à faire partie intégrante de l’éducation des jeunes filles. Si dans le domaine domestique il orne les trousseaux, l’Église quant à elle encourage la pratique de ce point. Pour elle, les broderies et en particulier le point de croix sont un moyen d’orner l’espace sacré avec élégance.
Ainsi, dès son plus jeune âge une fille bien éduquée apprend à marquer le linge et à broder bordures et symboles. C’est de cet enseignement que naissent les premiers marquoirs qui sont en fait le résultat d’exercices pratiqués sur des morceaux de lin. Le coton étant alors très rare en Europe et le nombre des coloris très restreint, les broderies sont effectuées avec des fils de soie ou de laine, ton sur ton.
Le marquoir, outil d’apprentissage des bases de la broderie au “point de marque », se transmet alors de mère en fille, se transformant au fil des générations en une véritable encyclopédie que la brodeuse utilise pour choisir le motif le plus adapté à son travail du moment.
Dans les pays anglo-saxons, ce support brodé porte le nom de « sampler » du latin exemplum (exemple). En Italie on parle d’Imparaticcio du verbe imparare (apprendre).
Les premiers marquoirs sont de forme rectangulaire et disposés dans le sens de la longueur. Les motifs sont brodés au hasard sur la toile et ne se présentent pas encore sous la forme de « tableau » qu’on leur connaîtra plus tard. Ils sont ensuite conservés, enroulés autour d’un cylindre dans la boîte à ouvrages.

© Victoria and Albert Museum, London
Dès 1500, grâce à Gutenberg et à l’imprimerie, les premiers schémas imprimés venant essentiellement d’Allemagne et d’Italie commencent à circuler. En France, Jacques Le Moyne publie « La clef des champs », un livret contenant des motifs de fleurs et d’animaux stylisés qui s’inspire de l’Orient et des symboles héraldiques (1586).
Entre les XVIème et XVIIème siècle, la broderie au point de croix apparaît de plus en plus comme une pratique qui incarne à la fois statut social et raffinement. Elle orne les demeures nobles et royales, enrichit les attributs religieux, allant jusqu’à illustrer des moments historiques et héroïques. Pour certaines personnalités comme la captive reine d’Ecosse Marie Stuart, la broderie relève d’une véritable passion. Elle réalise ainsi entre 1569 et 1585 un superbe ensemble en fils de soie dorés et argentés sur velours doublé de soie baptisé « The Marian Hanging ». Certains panneaux incluent des techniques de point de croix.

Dès la seconde partie du XVIème siècle, le point de croix se démocratise et gagne toutes les couches de la société, jusqu’à devenir le plus accessible et le plus populaire des points de broderie. Quelle que soit la partie du monde où il s’implante, il s’intègre rapidement aux ouvrages traditionnels pour devenir un marqueur de la culture populaire : En Allemagne du Nord et dans les régions alpines, il est brodé au fil de lin ou de laine afin d’obtenir des motifs en relief. Au Moyen Orient comme dans les Balkans, le point de croix se développe sous l’influence ottomane. En, il met en valeur depuis des siècles de couleurs chatoyantes les costumes traditionnels, les coiffes et le linge de maison.

Le XVIIème siècle ou la « Révolution rouge »
Au XVIIème siècle, les matières premières ultra marines commencent à arriver par bateaux dans les entrepôts de Lisbonne, Séville, Anvers et Londres, avant d’être réexpédiées et distribuées à travers l’Europe via les foires de commerce locales. La couleur rouge, extraite de la garance depuis des siècles sur le vieux continent est alors supplantée par d’autres teintures naturelles venues du bout du monde, obtenues à partir d’insectes vivant dans les chênes kermès des côtes méditerranéennes (Kermès) ou d’Amérique du Sud et du Mexique (cochenille). La qualité supérieure et la quantité disponible de ces colorants permettent dès lors d’obtenir facilement des fils à broder rouges, modifiant la configuration même des marquoirs qui seront dès lors brodés de cette couleur, symbole de vie, sur fond blanc.

Pour les femmes qui commencent à apprendre la lecture et l’écriture, broder des alphabets devient un exercice pratique. Ces pièces d’étude s’enrichissent graduellement de lignes de chiffres et de frises, petits animaux, motifs floraux ou religieux, l’enseignement étant alors dispensé dans les couvents. Viendront ensuite les premières figurations humaines sous forme de personnages folkloriques, de figures bibliques ou d’anges. La composition des marquoirs s’ordonne petit à petit, les transformant en de véritables tableaux. En Allemagne, les modèles de point de croix s’exécutent dans les tons rouge, bleu et noir, cette dernière couleur correspondant à celle du deuil.
Le XVIIème siècle correspond également à l’arrivée des premiers colons hollandais, français et britanniques en Amérique du Nord. L’influence hollandaise qui fut alors très importante en matière de samplers, explique pourquoi on les retrouve très vite dans le Nouveau Monde : les pionnières emportent avec elles leurs marquoirs que leurs descendantes reproduiront et enrichiront au fil des générations. La pièce la plus ancienne connue à ce jour fut réalisée par Loara Standish, de la colonie de Plymouth, vers 1645.
Ces dernières années, les marquoirs ont pris une place importante dans les collections des musées d’Amérique du Nord, témoignant de l’éducation des femmes américaines à leurs débuts. Nombre d’entre eux sont signés, portant même des inscriptions indiquant des lieux, des noms d’enseignantes et d’écoles.

https://americanhistory.si.edu/
Ce XVIIème siècle, marqué en Europe par les voyages qui joueront un rôle essentiel dans le façonnement de l’époque moderne, contribuera au travers d’échanges multiples, à enrichir la culture de chaque pays.
L’univers de la broderie et du point de croix seront eux aussi pris dans ce mouvement puisque les motifs se nourriront dès lors à la source d’une réserve commune dont il est aujourd’hui difficile de démêler les origines.
L’évolution des motifs au XVIIIème siècle
L’art de vivre du siècle suivant privilégie les espaces intimes qui permettent une vie amicale et familiale plus décontractée. Les petits appartements confortables sont décorés de meubles légers, conçus au féminin et agrémentés de porcelaines, bronzes, orfèvrerie, tapisseries, tissus, peintures et sculptures à sujets galants.
Le marquoir, majoritairement brodé au point de croix, ouvre petit à petit des perspectives aux brodeuses qui expriment dès lors davantage leur personnalité au travers de leurs réalisations. Les samplers, dans la droite ligne des Arts décoratifs de l’époque évoquent la beauté de la nature : Des scènes champêtres et des motifs floraux réalistes apparaissent, évoluant même dans la seconde moitié du siècle à la représentation de petits paysages. Ainsi, en Pennsylvanie, les jeunes brodeuses représentent leur maison ou leur école, ajoutant sur la toile leur nom et les dates importantes de leur vie.
En Europe, les alphabets se doublent de représentations des petits métiers, de maximes édifiantes mais aussi de textes religieux et de scènes bibliques. Ces derniers seront d’ailleurs totalement interdits au moment de la Révolution française, pour ne réapparaître qu’à la Restauration.
Les œuvres brodées poursuivent leur évolution vers des pièces plus ornementales. Les dessins s’affinent et se compliquent. Côté agencement, les motifs centraux commencent à jouer un rôle essentiel et les marquoirs passent de la forme rectangulaire à la forme carrée, les points de croix encadrant petits à petit les côtés de la broderie.

Le point de croix, âge d’or du XIXème siècle
Dès l’avènement de l’Empire, le point de croix fait un retour en force comme passe-temps favori des femmes de tous âges et de toutes classes. Enseigné à l’école, Les fillettes apprennent à lire et à écrire en brodant des abécédaires.
En même temps, l’industrie textile, la popularisation des revues féminines et les progrès de l’imprimerie accélèrent la banalisation de la broderie en général et notamment du point de croix. Si les premiers modèles destinés aux particuliers apparaissent dès 1770 dans la revue anglaise « Lady Magazine », le principe de la revue spécialisée va ouvrir un véritable marché dès la première moitié du XIXeme siècle. L’Allemagne commence ainsi à diffuser dans l’Europe entière des diagrammes imprimés sur papiers quadrillés et colorés à la main. Les motifs correspondent à l’air du temps, les dessins sont variés, de petite taille et rapides à réaliser. En 1840, on compte en Europe l’édition de plus de 14000 de ces schémas.
Dès 1838, le fabricant français de dessins et de tapisseries Jacques Simon Sajou édite des recueils de modèles avant de fonder en 1845 la toujours très connue maison Sajou. Il développe entre autres des techniques d’impression innovantes et propose des modèles accessibles, collaborant à des revues de référence comme le Conseiller des Dames et le Moniteur des Dames et des Demoiselles.
Dans les années 1880 l’aristocrate Thérèse Dillmont, admise à l’Académie de broderie de Vienne créée par l’Impératrice Marie-Thérèse, s’associe avec le filateur alsacien Jean Dolfus et s’installe près de Mulhouse. Elle fonde alors sa propre école de broderie : Le comptoir alsacien de la broderie. Elle créera également dans son atelier des ouvrages et des albums de modèles utilisant les fils Dolfus-Mieg. Elle fait paraître en 1886 l’Encyclopédie des ouvrages de dames qui deviendra pour les décennies à venir la référence absolue des brodeuses et le pilier des éditions DMC, traduite en 17 langues et diffusée à travers toute l’Europe.
C’est également au cours de ce siècle qu’est inventé le canevas Pénélope avec ses deux trames horizontales traversées de deux chaînes verticales. Cette découverte ouvre la porte aux tapisseries exécutées à petits et demi-points qui rencontreront un succès exceptionnel en particulier dans l’Angleterre de la Reine Victoria.
Cependant, à la fin du XIXeme siècle, même si le point de croix continue à être enseigné dans les écoles durant quelques années, sa pratique disparaît du quotidien des femmes qui vont lui préférer d’autres points.

Le livre du point de croix/G. Dormann et R. Deforges/1986
Du XXème siècle à nos jours : Déclin et renaissance du point de croix
Après une mise de côté des travaux d’aiguille par les femmes durant plusieurs décennies, les années 1980 voient « renaître de ses cendres » la pratique des arts manuels. L’image du point de croix se dépoussière. De nombreux magazines et livres proposent des modèles attrayants, des créateurs de kits émergent, rendant la pratique abordable à un large public. Des sites internet permettent des échanges, des associations de brodeuses au point de croix apparaissent sur tout le territoire, de très belles expositions ainsi que des concours fleurissent un peu partout. Des salons entiers sont dédiés à cette pratique, qui permettent de rencontrer des créateurs, de se fournir en fils, grilles et autres kits.
Le fait de broder a le vent en poupe et prend un sens nouveau : Cette activité apaisante permet de gérer le stress, agit sur nos capacités de concentration, nous donne du plaisir dans une dynamique de création valorisante ou les croix colorées égayent le quotidien. Le rythme méditatif engendré par le fait de compter les points et par la répétition du mouvement de l’aiguille qui passe au travers du tissu, génère une forme de méditation à la fois active et apaisante.
Loin d’être considérée comme vieux jeu, ce passe-temps suscite de plus en plus d’adeptes de tous âges, tous sexes confondus. Facile à emporter avec soi, l’ouvrage au point de croix nous suit partout : en voyage, mais aussi dans une salle d’attente, devant la télévision. Addictive, cette broderie au premier abord toute simple est une source de bien-être qui peut se transformer en passion dévorante.
D’autre part, les artistes contemporains qui créent les modèles d’aujourd’hui font preuve d’une imagination débordante, tout en sachant faire cohabiter dans leur motifs tradition et modernité.
Le point de croix comme marqueur identitaire
Si depuis le XVIIème siècle les activités commerciales s’étendent aux confins du monde, la pratique du point de croix essaime conjointement sur tous les continents, se mêlant aux différentes cultures. Ainsi émergeront des motifs qui petit à petit incarneront la spécificité des peuples.
C’est le cas des motifs scandinaves, généralement de formes géométrique et réalisés dans différentes couleurs dont l’un des plus connus représente d’une rose sur un fond blanc. Sur fond blanc également les motifs orientaux, élégants et raffinés. Ils reproduisent souvent des motifs végétaux comme des feuilles de bambou.

En Palestine les vêtements brodés sont encore aujourd’hui très largement portés par les femmes, notamment à l’occasion de fêtes et d’évènements familiaux, leur but étant entre autres de souligner l’identité politique et nationale de leur propriétaire. Les points de croix sont réalisés au de fil de soie souvent à dominante rouge sur une pièce de laine, de lin ou de coton. A partir de figures géométriques comme des carrés, des étoiles, des chevrons ou des losanges, les motifs stylisés symbolisent des collines, des cyprès ou des fleurs. Comme pour de nombreux pays, les motifs et les couleurs varient d’une région à l’autre.

Les arts textiles des pays slaves sont profondément liés aux riches traditions folkloriques de cette région du monde. Les motifs dépendent fortement de la culture de chaque nation. Ils sont généralement réalisés à partir de couleurs chatoyantes.
L’Ukraine représente l’exemple même de cet ancrage identitaire. Les motifs brodés depuis des siècles répondent à une dynamique de réappropriation culturelle par les ukrainiens et ukrainiennes du XXIe siècle, à l’intérieur ou à l’extérieur des frontières du pays.
Les motifs les plus anciens, de forme géométrique ont une signification bien précise : la ligne droite horizontale pour la terre, les lignes sinueuses pour l’eau, le carré divisé en quatre quartiers contenant des points ou des cercles pour le champ, le cercle pour le soleil.
Si le rouge et le noir font la beauté des broderies ukrainiennes, trois couleurs principales sont utilisées, chacune d’elle porteuse elle aussi de sens : le blanc symbolise le pouvoir, l’énergie et la spiritualité ; le noir correspond à la couleur du sol, à la prospérité et la solennité ; le rouge pour la vie.
D’autres motifs comme les fleurs, les hirondelles ou les colombes participent de la beauté de ces broderies.

https://threadandneedles.org/blog/hommage-a-la-broderie-ukrainienne/
Parfois taxé de basique et de peu d’intérêt, le point de croix se révèle au travers de son parcours historique mais aussi culturel comme l’ambassadeur d’une histoire particulièrement riche. Profondément ancré dans l’imaginaire de l’humanité, il a su se réinventer sans jamais renier son passé ancestral. Enseigné dans les écoles ou brodé dans l’intimité des logis, délaissé dans nos sociétés surmenées avant de ressurgir comme un baume apaisant, étendard de l’identité culturelle de certains pays, qu’on le brode dans les couleurs traditionnelles comme le rouge ou qu’il s’exprime au travers de couleurs chatoyantes, le point de croix renaît toujours de ses cendres et ses deux points obliques n’ont pas fini de nous séduire.
Pour aller plus loin:
https://thefreshcrossstitch.com/fr/blogs/curiosites/lhistoire-du-point-de-croix
https://threadandneedles.org/blog/hommage-a-la-broderie-ukrainienne/
La broderie ; splendeurs, mystères et rituels d’un art universel/ Claude Fauque/Ed Aubanel/2007
Le livre du point de croix/Geneviève Dormann et Régine Deforges/1986